Alerte à la bombe !!

Après des recherches éminemment poussées, William avait mis au point une technique magique extrêmement intéressante pour le genre humain... Pas un vaccin contre l'éclabouille, non, pas un sort permettant de contrer l'Avada Kedavra, pas un grand truc généreux... non, simplement une technique permettant de différer la mise à feu d'un pétard. Si ce n'est pas crucial pour l'humanité, ça... Bon, pour l'humanité peut-être pas, mais pour William, c'était incontestablement un grand pas en avant. Le Serpentard en avait assez de se faire prendre à chaque fois qu'il posait des pétards dans les couloirs. Non que le sablier de sa maison lui importât ; mais à chaque fois, il écopait soit d'une punition, soit d'une retenue, soit des deux, et cela commençait à bien faire. Il s'était amusé à calculer : au cours de sa troisième année d'études, il avait passé pas moins de trente-sept heures en retenue, s'il n'avait rien oublié.
Bref ; le Serpentard se trouvait dans un couloir désert, ce lundi matin, à installer son artillerie. Sa baguette en main, il prenait les pétards dans son sac, les tapotait en murmurant quelques mots, et les dissimulait dans les armures ; environ quatre pétards par armure, de quoi les faire tomber en morceaux et, accessoirement, perturber les cours (dont le cours d'Histoire de la magie, qui devait avoir lieu à quelques mètres et auquel William devait assister un moment après).
Car le Serpentard ne piégeait pas le couloir par hasard ; il haïssait le cours de Binns plus encore que les autres, et entendait bien le faire passer plus vite, en créant suffisamment d'agitation. En plus, il n'avait plus commis ce genre de sottises depuis au moins quinze jours, et il estimait donc qu'il fallait faire cesser la trêve... Si tout se passait comme prévu, les explosions seraient échelonnées, et elles seraient assez destructrices pour que les cours soient interrompus et les élèves évacués. Le temps que le couloir soit inspecté, l'heure d'histoire de la magie serait terminée...
Beaucoup de dégâts pour une petite cause, direz-vous, mais William aimait bien faire des dégâts, et il adorait troubler la vie un peu trop paisible du vieux château. En plus, avec la paranoïa créée par l'évasion de Sirius Black, il avait la partie facile...
Un groupe d'élèves s'engagea dans le couloir, et William fit semblant de fouiller dans son sac. Grâce à sa technique, la mèche des pétards était allumée, mais elle ne produisait ni bruit, ni odeur ; impossible de savoir qu'un pétard se cachait dans les armures du couloir. De toute façon, les élèves en question étaient des Poufsouffle de première année, et ils n'avaient guère envie de s'attarder en présence d'un Serpentard plus âgé. Ils se hâtèrent donc de quitter les lieux, et William put reprendre son importante activité. Après les armures, il s'attaqua aux fenêtres, et plaça les plus gros de ses pétards à proximité des vitres, dans l'espoir de les faire éclater.

Un bruit au bout du couloir intrigua le jeune homme, et il laissa retomber dans son sac le pétard qu'il venait d'y prendre. Il fallait attendre de voir qui arrivait avant de poursuivre. En attendant, le garçon s'agenouilla pour refaire son lacet, non sans guetter d'un oeil attentif le bout du couloir.

Une longue cape flottait derrière un homme de haute taille, l'étoffe tressautant au rythme de ses pas. Un rouleau de parchemin dans le poing, le Severus traversait un des couloirs du premier étage, le pas pressé et le visage affairé, ne lui donnant guère l'air plus ouvert qu'à l'accoutumée. L'homme revenait du bureau du "professeur" Lupin. Il était de ce fait, inutile de préciser que Rogue était en proie à un sentiment d'allégresse sans nom pour avoir eu le plaisir d'échanger quelques mots avec son ancien camarade d'école ! Un rictus au bord des lèvres, ses doigts aux jointures blanchies froissaient le papier qu'ils retenaient prisonnier. Lui, professeur...! A quoi Albus jouait-il donc ? Quelle folie lui prenait-il, de placer un loup-garou comme professeur de Défense contre les Forces du Mal ? Il avait beau se répéter, se convaincre que Remus ne garderait pas son poste au délà d'une année, la rancoeur ne cessait de lui crisper l'estomac dès que l'image même du visage effrontement calme de Lupin lui venait à l'esprit. Qu'il meurt à la fin de l'année, comme ce couillon de Quirrell ! Pensa-t-il. Mais malgré tout, quand le jeune professeur l'avait prié de l'aider, Severus avait cédé à regrets. Nul n'était besoin de préciser que si Severus avait accepté de concevoir une potion Tue-loup à Remus, ça n'était pas dans le but de le soulager de sa situation, mais plutôt pour sauvegarder la sécurité des cornichons qui allaient insouciamment participer à ses cours.
La missive de Dumbledore pour seule victime de sa mauvaise humeur, Severus bifurqua dans le couloir sans s'arrêter devant la classe du professeur Binns, dont la voix monocorde s'élevait, bourdonnement incessant à demi étouffé par la porte close. Mais alors qu'il allait prendre la direction de l'infirmerie dans le but de lui emprunter quelques bouteilles de potion de régénération pour son prochain cours avec les septième année, une masse informe à l'extrêmité du couloir attira son attention. Mais quand son regard d'onyx se braqua sur "la chose", Severus se rendit compte qu'il s'agissait d'un élève solitaire accroupit. Sûrement refaisait-il son lacet. Soit, mais que faisait-il dans ce couloir à une telle heure, plutôt qu'être en cours ou dans sa salle commune. Rogue tiqua mais, sans hésitation et d'une démarche qui avait doublé en rapidité. Et en un plissement d'oeil, il avait reconnu la tignasse noire du freluquet qu'il dominait de sa haute taille. Et la cravate qui pendait dans le vide, verte et argenté, confirmait l'identité du jeune homme.

" Puis-je savoir ce que vous faites ici, Monsieur Boyd ? Votre cours d'Histoire de la Magie commence l'heure suivante, vous êtes bien en avance. Etonnant, quand on a connaissance votre niveau scolaire. "

Severus se trouvait bien indulgent dans ses propos. William Boyd était un véritable cancre qui, s'il n'avait pas été de sa Maison, aurait été définitivement exclu de ses cours. Et quand on constatait de ce qu'il retenait de ces derniers, cela ne lui aurait pas fait grand mal.

Du coin de l'oeil, William épiait l'extrémité du couloir, et c'est avec agacement qu'il reconnut la démarche vive et la cape noire de son directeur de maison. Il se releva prestement- pas question d'attendre un genou en terre que Rogue arrive à sa hauteur- pour saluer poliment l'enseignant. Il n'appréciait pas Rogue davantage que les autres professeurs, mais il se devait de le ménager et de lui témoigner un peu plus de respect qu'aux autres. Le maître des potions pouvait lui être très nuisible s'il le souhaitait (c'était d'ailleurs parfois le cas) et le jeune Boyd ne tenait pas à supplanter Potter dans les haines de l'ami Severus. Jusqu'à présent, il estimait ne pas occuper la première place dans la liste noire du maître des potions ; Harry Potter et Lupin, au moins, étaient avant lui. Bien sûr, en tant que cancre patenté et élève le plus dissipé de la maison Serpentard, William devait cependant figurer en bonne place dans les bêtes noires de son directeur de maison... Il avait déjà passé pas mal d'heures en retenue avec l'homme en noir, et ne tenait pas à y retourner dans l'immédiat...
Son "bonjour professeur" murmuré fut étouffé par les propos grinçants de Rogue. Le Serpentard s'y était attendu, mais il demeura tout de même muet quelques secondes. Depuis son plus jeune âge, il était passé maître en invention de bobards, excuses et boniments en tout genre ; mais face à Rogue, il se sentait moins à l'aise qu'avec quelqu'un d'autre. L'enseignant lui donnait l'impression de lire dans les pensées, et donc d'être beaucoup plus difficile à duper, par exemple, que le professeur Flitwick qui gobait absolument tout... Du coup, il valait mieux trouver quelque chose de plausible à lui raconter.
William hésita, puis répondit le plus naturellement possible :

-En fait... je me suis trompé d'heure, monsieur.

D'habitude, quand il se trompait d'heure, c'était toujours en retard, jamais en avance. Mais bon, il pouvait bien se renouveler, personne ne s'en plaindrait... D'ailleurs, sa tenue débraillée pouvait confirmer son histoire ; sa cravate n'était pas nouée, sa chemise dépassait, et son col n'était pas boutonné... la preuve qu'il s'était dépêché, quitte à négliger son uniforme... Bien sûr, il n'était jamais impeccable (quelle idiotie, cet uniforme ! on se serait cru chez les Moldus !) et portait volontiers sa tenue scolaire d'une façon plus décontractée qu'il n'était acceptable. Les autres élèves de Serpentard, eux, arboraient fièrement l'uniforme de leur maison, et par volonté de se démarquer, William prenait un malin plaisir à traiter les couleurs de sa maison sans respect, allant jusqu'à nouer sa cravate en guise de ceinture. Rogue ne devait pas apprécier cette attitude désinvolte, mais autant que le jeune homme s'en souvienne, ils n'avaient jamais eu l'occasion d'en parler.
La compagnie du maître des potions n'était pas des plus agréables- enfin, pour le jeune Boyd ; d'autres trouvaient Rogue parfaitement charmant... mais bien sûr, il était exclu que le cancre de service partage cette opinion. Inexplicablement, son directeur de maison se montrait cassant avec lui, lui reprochant ses mauvais résultats et son obstination à perdre des points... Peu désireux de prolonger l'entretien, William décida de prendre congé ; mais face à Rogue, son aplomb naturel lui faisait défaut, et c'est d'une petite voix presque craintive qu'il hasarda :

-Je vais retourner à la salle commune...

Avant que le regard inquisiteur de Rogue se pose sur un pétard, surtout... sinon, il risquait fort de décrocher le titre de premier Serpentard assassiné par son directeur de maison. Un titre de gloire dont il se passait fort volontiers.

A peine Severus s'était-il avancé en direction du jeune homme que ce dernier s'était relevé, confirmant son identité. S'il y avait bien un Serpentard qu'il reconnaissait à la tignasse, c'était le jeune Boyd qui avait passé bien des heures dans son bureau à copier quelques milliers de ligne, offrant le sommet de son crâne pour toute vision au Maître des Potions tandis qu'il piquait du nez dans ses rouleaux de parchemins couverts d'une seule et unique phrase répétée jusqu'à ce que son poignet en soit endolori, ou d'une longue et fastidieuse explication sur la nécessité de tel ou tel ingrédient dans une potion, ou d'un commentaire gigantesque sur le dernier cours qu'il avait suivit, ou du moins, où il avait fait acte de présence. Car dire de Boyd qu'il suivait les cours était hyperbolique. Une fois, Severus lui avait fait remarquer qu'il ferait mieux de troquer sa tenue scolaire mal enfilée pour un costume de touriste, ce qui avait fait rire une petite poignée de Gryffondor. Le résultat : 25 points de moins pour les Rouge et Or, et un devoir supplémentaire pour le jeune homme. Par orgueil (il n'avait pas besoin d'entacher plus encore le blason de Salazar), Severus avait accordé au jeune homme un répit jusqu'à la fin du cours, avant de lui asséner ce fameux devoir de deux rouleaux de parchemin lorsque la classe s'était vidée des Gryffondor. La vision donc du jeune Boyd était aussi fatigante que celle du plus abruti des Rouge et Or. Non pas parce qu'il prenait un malin plaisir à transgresser toutes les règles qu'il pouvait, mais parce qu'il faisait toujours en sorte que ces aneries de la pire sorte soient découvertes, afin de faire disparaître les précieuses émeraudes du bas du sablier des Serpentard. Quant à ses devoirs... Il était devenu rare que Rogue s'attarde à lire plus de cinq lignes avant de tracer un "P" enragé sur le haut de son parchemin. Il n'y avait pas besoin de se rendre compte que sa rédaction méritait bien pire qu'un Piètre, les pires côtés de Serpentard étaient déjà assez marqués comme cela chez William Boyd.
Alors, quand le jeune homme rétorqua qu'il s'était manifestement trompé dans les horaires, Severus eut automatiquement un haussement de sourcils dubitatif. Qu'était-ce donc que ce mensonge ?... Une longue expiration fit frémir ses narines avant que, l'air penaud, le Serpentard ne propose de rejoindre la salle commune. Le regard glacé de Severus parcourut les horizons, à la recherche d'un indice sur la raison véritable de la présence du jeune Monsieur Boyd dans ce couloir.

"Vous allez rester ici, pour le moment, Monsieur Boyd."

Les deux onyx noirs qui servaient d'yeux au Maître des Potions se reposèrent sur l'élève, qu'il scruta d'un long regard pénétrant. Utiliser la légilimencie sur ses élèves était interdit, mais la situation rendait tentant d'envoyer au Diable ce décret... Seul les couleurs du jeune homme, l'estime qu'il portait à la Maison de Salazar, Sa Maison, le retenait. Et il n'en eut pas besoin. Son regard se porta sur la fenêtre tandis qu'un rayon de Soleil traversait le vitrail et éclairait une petite forme cylindrique posée à même la pierre.

"Je n'aime pas les menteurs, Monsieur Boyd. Et je les aime encore moins lorsqu'il s'agit d'élèves de ma propre Maison."

Severus sortit sa baguette tout en approchant d'un pas lent de la fenêtre, méfiant. Non pas qu'il craignait la magie et les méfaits du Serpentard, mais il avait acquit une expérience en matière de blagues de pré-adolescents qui dépassaient la moyenne des professeurs. Cela s'expliquait sûrement dans le fait qu'il en avait longtemps été la victime et qu'il avait, à force, finit par haïr toutes sortes espiègleries. D'un sortilège de lévitation informulé, Severus fit s'élever ce qu'il reconnu comme un gros pétard dans les airs, avant de le faire approcher, proche, de plus en plus proche de l'élève qu'il tenait prisonnier entre la fenêtre et lui.

"Dois-je réitérer ma question, ou attendre qu'il se passe une catastrophe ?..."

La mèche du pétard se consumait toujours aussi bien, et le professeur ne faisait pas mine d'arrêter la flammèche. Il se reculait plutôt, laissant le pétard à quelques centimètres du visage de Boyd avec un demi sourire qui n'avait rien d'amical. Il était grand temps pour le jeune imprudent de lui remettre les idées en place et ce moment semblait tout indiqué au professeur pour se prêter à cette fastidieuse tâche ! Ca n'était pas qu'il prenait plaisir à être aussi dur avec un garçon qui portait la cravate verte et argent, mais la honte d'être le directeur d'un pareil insouciant était trop pesante pour qu'il n'y fasse rien.

*A nous deux, jeune homme...*

La voix de son directeur de maison, à peine plus puissante qu'un murmure, mais parfaitement audible, avait le don de mettre William mal à l'aise. Peu d'adultes, à Poudlard ou ailleurs, pouvaient se vanter de produire un tel effet sur l'effronté Serpentard... mais avec Rogue, il perdait quelque peu de sa superbe. Avec un autre enseignant, il aurait quitté les lieux, malgré l'ordre de rester sur place ; là, il n'osait désobéir à l'ordre murmuré par Rogue, et demeurait immobile, suivant avec appréhension le regard noir du maître des potions.
Ce type avait un sixième sens, un radar, des antennes, quelque chose qui lui permettait de découvrir la vérité plus vite qu'aucun autre professeur... ce n'était pas possible sinon.... Il ne fallut que quelques secondes aux yeux froids de Rogue pour se poser sur l'un des pétards, sur le rebord de la fenêtre. William eut un instant de panique en le voyant tirer sa baguette- le geste avait été si inattendu que, quelques secondes durant, le jeune Boyd s'était attendu à ce que son professeur lui lance un maléfice. Mais Rogue avait apparemment d'autres idées en tête, des idées moins spectaculaires, mais pas forcément moins déplaisantes pour le jeune homme.
La mèche du pétard s'enflamma, et William put respirer l'odeur âpre de la poudre, entendre le crépitement, voir chacune des étincelles, tandis qu'il observait, fasciné, le cylindre rouge vif flottant à quelques centimètres de son visage... Si le pétard explosait, à cette distance, il y aurait du dégât. Le jeune Boyd fit un pas de côté pour s'éloigner du dangereux objet, mais celui-ci le suivit, faisant naître un sourire mauvais sur les lèvres de Rogue...
Le pire dans tout ça, c'est qu'une fois défiguré par l'explosion, il serait sans doute renvoyé ; Rogue n'aurait qu'à expliquer qu'il l'avait surpris piégeant le couloir, qu'un geste malheureux du Serpentard avait conduit à ce déplorable accident, et qu'il valait mieux se débarrasser du fauteur de troubles avant qu'il ne fasse pire... William croyait déjà entendre les arguments de son directeur de maison... « En me voyant, il a paniqué, et le pétard a explosé... Rendez-vous compte, monsieur le directeur, c'est déjà malheureux que ce soit tombé sur lui, mais si un élève innocent avait été blessé par la faute de cet inconscient... »
Plus que quelques secondes pour se décider à avouer la vérité... S'il fallait être renvoyé, autant que ce soit avec un visage entier... D'une voix qui trahissait la panique, William capitula :

-D'accord, d'accord !! je vais tout dire... enlevez-moi ce truc...

Sous le regard effaré du Serpentard, les étincelles s'approchaient de plus en plus dangereusement du corps du pétard, et Rogue semblait jouir de la situation. Sa baguette levée, il s'était reculé, de façon à ne pas être dans le rayon d'action du pétard ; son regard, son rictus, et toute l'expression de son visage en disaient long sur la satisfaction qu'il pouvait éprouver en voyant Boyd coincé, pris à son propre piège. Dans l'interminable course-poursuite que se livraient le professeur et l'élève, il venait de remporter une bataille, et sa politique était claire : malheur aux vaincus.
Retenant son souffle, William attendait un geste du maître des potions, l'arrêt du crépitement, quelque chose... En même temps, il se demandait avec inquiétude comment présenter la situation à Rogue. De tout côté qu'on l'examine, le cas du jeune Serpentard semblait désespéré...

La tension du jeune Boyd était palpable dans l’air, brume épaisse et verdâtre empestant l’air à en fait suffoquer une créature portée vers la compassion ou tout autre faiblesse du cœur qui passerait par là. La satisfaction de Rogue, en revanche, l’auréolant d’un parfum sucré de victoire, protégeant son nez fin et crochu des relans d’angoisse de son indigne d’élève. Enfin, les nerfs lachèrent, les mots tombèrent : il capitulait. Pendant quelques centièmes de seconde, Severus laissa aux étincelles le plaisir de grignoter encore quelques millimètres de fil, puis elles se figèrent au mouvement de la baguette du Maître des Potions. Le regard de Rogue sonda le jeune élève à sa merci, fixe à en donner la chair de poule. Enfin, il parla.

« Il suffit d’un simple mouvement de ma baguette, Monsieur Boyd, et… »

Comme pour donner plus de poid à ses mots, un faible crépitement retentit et l’odeur de souffre s’éleva encore une fois entre William et Rogue, comme en présage d’une fin déplorable pour le Serpentard.

« Maintenant, j’aimerais savoir ce qu’un pétard fait sur le rebord de cette fenêtre et pourquoi vous vous trouvez juste devant ce dernier. Il sera tout à votre avantage de me dire la vérité, jeune homme. Autrement, je crains que je ne saurais vous protéger à temps du malheureux incident qui risque de survenir… »

Aurait-il vraiment défiguré un élève de Serpentard qui aurait commit l’erreur abominable de lui tenir tête ? En tout cas, la lueur mauvaise brillant dans l’onyx noir de ses iris n’en laissait pas présager autrement. S’il ne l’aurait pas fait, il n’avait nul envie de laisser la vérité la plus raisonnable traverser l’esprit du cancre. Il voulait des aveux, et vite.

Si une personne à Poudlard pouvait se vanter d'inspirer de la crainte à William, c'était bien Rogue. Surtout quand il avait son air de cinglé prêt à tout... précisément l'air qu'il avait à cet instant, alors qu'il tenait sa baguette levée vers son élève, et que son regard froid laissait présager le pire. Aurait-il réellement laissé exploser le pétard à la figure d'un élève, comme il menaçait de le faire ? Peut-être pas, mais le test était un peu trop risqué au goût de William : rien n'était jamais sûr avec Rogue, et une explosion en plein visage devait être terriblement douloureuse- sans parler des conséquences à long terme.
Dans une tentative désespérée pour échapper à son directeur de maison, William recula d'un pas ; le dernier, car il se retrouva tout contre le mur. Rogue maintenait sa baguette levée, et le pétard avait suivi Boyd, dans un bruit de crépitement assez affolant ; plus que quelques millimètres avant l'impact... Le Serpentard ferma les yeux, pour les rouvrir lorsque le crépitement s'interrompit. Rogue le regardait, les yeux froids et fixes, sa baguette toujours prête à rallumer le pétard.
William allait parler, mais le crépitement reprit... un millimètre encore... Le jeune Boyd soupçonnait Rogue de prendre un certain plaisir à ce petit jeu, et il s'en voulait d'autant plus qu'il s'était mis dans ce pétrin tout seul, comme un grand. Avouer, c'était la seule solution... mais des aveux le préserveraient-ils de ce pétard que Rogue tenait à la hauteur de son visage ?... pas sûr ; son directeur de maison voudrait peut-être profiter de son avantage pour tirer vengeance du trublion. Mais qui sait ? peut-être aurait-il un peu de clémence, si William avouait sans se faire prier... Sans quitter le pétard des yeux, le jeune homme s'expliqua :

-C'est... c'est moi qui a mis ces pétards, Monsieur... pour... pour le cours d'histoire de la magie... Ils doivent exploser dans quarante minutes à peu près...

Pour le moment, il ne pouvait guère aller plus loin dans les aveux. La vision de ce pétard prêt à lui emporter la moitié du visage le rendait terriblement nerveux, et il craignait que ses nerfs le lâchent pour de bon. D'une toute petite voix, que même Rogue n'avait jamais dû entendre, il fit :

-S'il vous plaît...

Il leva les yeux du pétard vers Rogue, puis les reposa sur le cylindre rouge. Que son directeur de maison laisse ce pétard, c'était tout ce qu'il demandait. Ensuite, il était prêt à subir tous les châtiments que le maître des potions voudrait lui infliger ; Rogue avait suffisamment d'imagination pour renoncer à ce pétard, aucun doute à ce sujet...